Le discours gouvernemental est bien rôdé : pour faire baisser la mortalité routière, il faudrait avant tout s'en prendre à la vitesse excessive.
Pourtant, il existe d'autres causes importantes d'accidents qui sont aujourd'hui négligées et qui nous concernent pourtant tous.
Pour descendre sous la barre des 3.000 tués sur la route, le gouvernement mise principalement sur la répression de la vitesse. Une politique cohérente avec les conclusions des rapports de la Sécurité routière, qui désignent la vitesse comme la principale responsable des accidents mortels. Mais l'institut d'étude des accidents de la route, créé en 2011 par l’association "40 Millions d’Automobilistes" (320.000 adhérents) veut aller plus loin avec son dernier rapport et mettre un terme à l’opacité qui entoure certaines données officielles.
Ce rapport, téléchargeable sur le site de 40 millions d'automobilistes, apporte tout d'abord un minimum d'humanité dans des chiffres dont on oublie parfois qu'ils parlent de vies brisées. Ces trente-quatre pages rappellent aussi certaines évidences. Comme pour les deux-roues motorisés, beaucoup plus nombreux sur les routes en été (5 tués par jour) qu'en hiver (1 tué par jour). Ou les piétons qui croient, souvent à tort, car ils sont très rarement vêtus de vêtements réfléchissants, être visibles de nuit par les automobilistes (en 2011, 99 tués en agglomération, 105 sur route). Ce rapport concorde parfois avec les résultats de la Sécurité routière. Sur l'alcool au volant, notamment. Ainsi, si seulement 3,5 % d'automobilistes circulent sous son influence, cette population constitue 35 % des morts. Car souvent, ivresse rime avec vitesse excessive... la seconde découlant évidemment de la première.
En revanche, les résultats de cette étude révèlent le nombre important de victimes en ligne droite quand rien, a priori, ne devrait venir troubler leur trajectoire.
Ici, l'inattention et la somnolence sont prouvées (par exemple, dans 155 cas impliquant un poids lourd, ce dernier voit l'accident arriver, fait des appels de phare, se range à droite, mais le véhicule continue à arriver droit sur lui...). Mais la somnolence, difficilement quantifiable et sanctionnable, ne semble pas aujourd'hui intéresser le gouvernement alors que cela pourrait représenter près de 30 % des 4000 morts de 2011 !
1.130 victimes en ligne droite sur les nationales
Sur les routes nationales, en 2011, 1.130 personnes ont trouvé la mort en pleine ligne droite (soit 28 % des victimes, tous réseaux confondus). Parmi elles, 149 mettent en cause un deux-roues, 249 sont dus à l’alcoolémie. Mais surtout, les 732 restants ne s’expliquent que par la distraction ou la somnolence, deux causes auxquelles les radars ne peuvent rien... Pour autant, les autorités préfèrent avancer comme explication à ce chiffre élevé la vitesse excessive –étonnant pour une perte de contrôle en pleine ligne droite- ou l'utilisation du téléphone au volant. Et ce, sans jamais réellement mesurer son impact, puisque l'état n'a jamais demandé aux opérateurs téléphoniques de corroborer cette analyse avec les relevés des communications des victimes...